Comment réduire la pléthorique candidature à la députation nationale et provinciale ?

Comment réduire la pléthorique candidature à la députation nationale et provinciale ?
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Mon cher Richacha,

Je suis aussi étonné comme le monde entier par cet engouement vers la politique pour la députation. Certes, dans un État démocratique, rien n’est plus légitime, plus légal que cette expression de liberté ouverte vers la fonction la plus noble qui soit, celle de représenter les intérêts et les aspirations des populations. La République Démocratique du Congo n’échappe pas à la règle.

Si donc, comme on considère notre pays comme un État démocratique, on ne peut empêcher qui que ce soit de postuler à un mandat populaire dans la stricte réglementation en la matière. Ma préoccupation n’est donc ni fortuite ni aléatoire. Mais l’affluence est tellement inquiétante que dans un passé proche, le gouvernement a essayé de décourager cette fièvre politique sans pourtant y parvenir par des mesures telles que le seuil de recevabilité des partis et regroupements politiques.

Il s’avère malgré tout être un échec, et il est visible par la publication par la Commission électorale indépendante (CENI) des listes des candidats aux députations nationale et provinciale. Démontrons ce qui est un secret pour personne. Pour 500 sièges disponibles, les candidatures posées ont été estimées à plus de 30 000 (trente mille) pour la députation nationale, et pour la seule province du Kasaï Oriental, par exemple, pour 22 sièges, j’ai listé plus de 1 500 candidats à la députation provinciale. Ces chiffres sont certes provisoires, mais ils reflètent néanmoins l´ampleur du problème. Car c’est un vrai problème de société dans la mesure où le conscient collectif national reste figé sur la politique, délaissant d’emblée d’autres secteurs d’activités nationales qui semblent peu lucratives pour un Congolais lambda. C’est ainsi que ce dernier dit inconsciemment en langue nationale : “Tika ndeko, na mboka oyo politique eza nyonso”(1). Mais cela est une autre paire de manches.

Revenons à notre sujet. Devant cette dégoûtante situation, je me suis interrogé et tout le monde s’interroge sur ce phénomène unique en Afrique : à quoi rime cette multitude de candidatures ? Quel en est, en fait, le motif déclencheur ? Le devoir de servir son pays en politique ?  Le souci du bien-être des populations congolaises ? Les réponses qu’on pourrait glaner par-ci par-là ne sauraient refléter, à mon humble avis, le bien-fondé de cette course effrénée vers la députation. La raison valable, la vraie, la plus explicite ou la plus objective qui soit est la honteuse et colossale rémunération. Ne nous voilons pas la face. Cela paraît simpliste, mon cher Richacha, mais la députation, qu’elle soit provinciale ou surtout nationale, paie. Et elle paie grassement. Tout le monde le sait et on le dit tout haut. Certains députés en ont parlé dans l’hémicycle, tandis que d’autres essayaient de le disculper. Et les quelques débats dans des chaînes de télévision ont vite été oubliés dans les vicissitudes de la vie quotidienne. La politique a toujours été dans notre pays le secteur formel le plus lucratif de tous les autres. Il y a bien de gens, je dois le dire, en dehors de l’hémicycle, qui ne souhaitent pas qu’on en parle pour la simple raison qu’ils aspirent eux aussi, à leur tour, devenir honorables députés et jouir non seulement de cette honorabilité et surtout des monstrueux émoluments leur échus.

Il est à remarquer, mon cher Richacha, – tu me contrediras si je me trompe – que peu d’entre les candidats ont exercé un travail dans l’administration publique ou privée, souvent ils ont été dans l’informel, ceux qui avaient un emploi quelconque l’abandonne pour miser plus haut pour les raisons évoquées ci-haut et le reste, bien sûr, veut s’éterniser au Parlement, ou plutôt dans les Assemblées nationale et provinciale. N’est-ce pas que la profession politique est exempte de contrainte de retraite ? Peu de gens me contrediraient si je disais que la liste pouvait bien être plus longue que celle que nous déplorons déjà, si certaines conditions d’éligibilité – niveau d’études, caution, casier judiciaire – ne tenaient pas à l’écart la multitude de Congolais et Congolaises qui aspirent, hystérique, à une bonne vie à travers la députation.

Mon cher Richacha, je viens donc de donner les véritables raisons de ce pléthore de candidatures, et je vais maintenant te donner la formule pour en restreindre drastiquement le nombre pour les Assemblées nationale et provinciale, mais aussi pour le Sénat. La formule est connue de tout le monde, je l’avais même suggéré dans ma dernière réflexion contre l’avant-projet de Constitution du Professeur Ndaywel Isidore : réduire et le montant des émoluments des députés et leur nombre.

Comment et par quel moyen ? Deux procédés sont possibles, l’un à court terme, et l’autre à moyen terme : à court terme, bien sûr, par l’ajustement des traitements du député à un niveau quelque peu élevé du net à payer du Secrétaire général de l’Administration publique. Et le tour sera joué, puisque l’effort ou l’investissement à consentir pour se faire élire n’en vaudra plus la peine. Je puis parier tout que les candidats d’aujourd’hui ne seront plus candidats de la prochaine législature. Avec le généreux pactole de fin mandat, ils pourront ainsi se lancer dans les affaires, créer des petites et moyennes entreprises, des coopératives bancaires à capitaux majoritairement congolais, qui absorberaient une partie de nos jeunes désoeuvrés des villes et dans les milieux ruraux, et stimuleraient la production des paysans.

Conséquemment, les hémicycles pourront alors être constituées d´hommes et de femmes politiques nés. C´est-à-dire, ceux qui viennent à la politique par vocation pour servir la collectivité, non pour se faire enrichir ou après s´être fait enrichis par la politique. Et ceux dont la dotation parlementaire aussi réduite soit-elle, pourrait continuer d´être considérée à leurs yeux comme un pactole, à la différence de ce qu’ils gagnaient auparavant et surtout qu’elle sera désormais à la hauteur du terme usuel du panier de la ménagère. À moyen terme, une réduction conséquente du niveau de chômage, accompagnée d´une politique salariale et d´une hausse du niveau de vie dignes des ressources de la RD Congo s´ensuivront.

À plus tard.

Bababebole Kadite

Norvège, le 28/10/2023.

—————————————————————————————————————————(1) Laisse tomber, frère, la politique est tout ici au pays.

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